Hors-service

Jours 185 à 191 – mercredi 26 octobre à mardi 1 novembre 2022 – Puno, Llachon, Juliaca, Arequipa – Pérou

Ma musique “mémoire” du lieu, à écouter durant la lecture si ça te dit !

Le lac Titicaca

Tout juste arrivés à Puno après une nuit mouvementée face au zèle du conducteur sur la route, l’heure nous donne au moins le luxe d’observer un lever de Soleil à la palette riches en teintes rouges et oranges au-dessus du lac Titicaca, plus haut lac navigable du monde avec ses 3 812 mètres d’altitude.

Je fais de nouveau mes au revoir à Thibault et Romane qui se dirigent vers la partie bolivienne du lac et monte à bord d’une petite embarcation pour traverser une partie du lac jusqu’à la péninsule occupée par le village de Llachon dont on vante le calme et le séjour authentique chez l’habitant. En chemin, nous faisons un arrêt par les îles Uros.

Ouais, il fait chaud !

Parfaitement artificielles, elles sont uniquement composées d’une espèce de roseau locale appelée « totora ». Et chose surprenante, elles sont habitées ! En effet, les « gens du lac » vivent dessus depuis le XIIIe siècle en ayant fuit les Incas. On trouve presque une centaine d’îlots qui sont de véritables radeaux déplacés et réunis pour les grandes occasions. Les enfants prennent l’une des embarcations familiales pour aller quotidiennement à l’école.

L’île que je visite est habitée par 12 personnes, généralement en famille. Le tourisme est monnaie courante pour certaines aujourd’hui (et une forme de logement de luxe sur des îles dédiées s’est développé). Bien qu’on peut reprocher d’en fait perdre l’authenticité, je pense au contraire que cela permet de maintenir ce mode de vie difficile avec la tentation de la ville à quelques kilomètres où les hommes se rendent régulièrement pour troquer. La population totale est encore sûrement à 100% indigène. On trouve aujourd’hui des églises, des supérettes, un musée et des écoles sur quelques îles.

Sur terre ferme, me voilà déambulant dans la chaleur écrasante avec mes sacs, luttant contre l’essoufflement causé par l’altitude. Au bout d’une demi-heure de marche, je croise une célébrité locale qui m’indique son logement en location. Félix est en effet le premier à avoir eu l’idée de développer le tourisme dans son village en proposant un séjour d’immersion chez l’habitant. Il a construit avec le soutien de sa femme sa maison pour s’y loger ainsi que les curieux qui s’aventureraient jusqu’ici. Aujourd’hui, Llachon propose des dizaines, si ce n’est plus de locations, alors que personne ne croyait à son projet au début.

A défaut de comprendre l’espagnol ou le quechua, il y a de jolies images (je n’ai pas retrouvé le reportage de Terre Inconnue).

Lorsque le COVID a pris de l’ampleur, le gouvernement péruvien ne semble pas avoir donné le temps à ses habitants de rentrer chez eux et le confinement immédiat à forcer de nombreuses personnes à tenter de rentrer chez eux en évitant l’amende salée et en faisant le trajet… à pieds. Lors de la reprise, timide, les agences ont envoyé des groupes notamment chez Félix et sans le payer pour ses services, remboursant uniquement les frais engagés par les repas. La situation était déjà difficile, les locaux ayant survécu grâce à l’agriculture locale sur la péninsule à cultiver la pomme de terre. Voilà que les agences se sont engraissées sur le dos de ces personnes démunies et sans recours.

Tu comprends pourquoi je me suis arrêté par ici en errant sur la péninsule ?

Mon séjour dans ce petit paradis sera court mais la beauté du lieu et de ses couchers de Soleil n’en seront que plus savoureux. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de rencontrer sur place un couple de jeunes retraités, Marie et Alain, ainsi qu’un baroudeur de 78 ans, Claudio. Ces trois français m’accompagneront lors d’une balade jusqu’au sommet de l’île et nous partagerons de nombreuses et agréables discussions. Je réaliserai qu’aux yeux d’autres personnes, mon voyage n’a rien d’ordinaire quand pour moi, c’est devenu simplement mon quotidien.  


Arequipa

Après plusieurs heures de transport sans intérêt à détailler, j’arrive à Arequipa, dernière étape dans ce pays, cernée par les volcans dans une zone désertique impressionnante. Fatigué mentalement et physiquement, je me trouve une chambre privée et la tentation de ne rien faire pendant trois jours est très forte. La région est riche en activité mais je n’ai pas la motivation et j’accepte de plus en plus de ne pas faire les excursions recommandées à quelques exception.

Une cimenterie impressionnante à la lisière de la ville

L’énergie du centre-ville à l’approche d’Halloween m’anime mais face à l’annonce de mauvaises nouvelles que je m’abstiendrai de préciser, la solitude me prend pour la première fois en six mois de voyage. Loin des proches avec pour seule connexion à ce monde une page WhatsApp sur un écran de quelques pouces, le contact physique me manque tout comme le partage de moments de qualité, la sédentarité et la familiarité…

Ambiance Halloween

J’ai la chance de faire plusieurs rencontres durant mon séjour sur place qui me permettront de sortir me changer les idées en allant chanter à un karaoké avec Gaby et ses collègues (où je me retrouve à rejoindre un senior qui a du mal à suivre Sinatra, offrant un très joli moment). Je suis invité à aller danser avec Yemisselt et à me joindre à un anniversaire me rappelant les boums de préadolescents tant la timidité était forte sur place et assez rigolote à observer. Le tout offre de jolis moments qui apaisent mon esprit préoccupé. Enfin, je partage un cours de cuisine avec Monica à Chira Fusion où j’apprends à préparer un chaufa de crevettes, le fameux ceviche et le délicieux cocktail qu’est le pisco sour.

La tentation de passer au moins par un musée est trop forte et je fais la rencontre assez émouvante et déconcertante de la célébrité de la ville, Juanita. Cette enfant a été sacrifiée sous le règne inca pour apaiser la colère du dieu Ampato, au sommet d’un volcan. Conduite depuis probablement Cuzco, la jeune adolescente de sang noble devait ainsi rejoindre le rang des dieux via son sacrifice et était d’ailleurs sélectionnée et préparée depuis son enfance à cela. Tuée d’un coup de bâton sur la tempe, elle ne semble ni avoir souffert physiquement ni avoir paniqué à l’heure fatidique (peut-être à cause de la chicha hallucinogène consommée avant et le froid du sommet enneigé).

Trouvée en 1995 à 6000 mètres d’altitude après un éboulement, son corps est resté pendant 500 ans quasiment intact (à défaut du visage exposé au Soleil à la suite de l’évènement naturel). Aujourd’hui dans une boîte de verre réfrigérée, je n’ai pu ressentir autre chose qu’une immense peine en la rencontrant et apprenant son histoire. De nombreux autres enfants ont été découverts avec des honneurs moindres que Juanita sur plusieurs sommets de la région et confirment les traditions incas.

Il est temps de se dépayser et de faire mon entrée au Chili où je rejoins ma complice Lorène qui est de voyage en même temps que moi et avec qui je vais partager la région nord du pays.

Le Pérou aura offert son lot d’expériences marquantes (parfois bien trop) et ses rencontres qui me changeront plus que je ne le pensais à terme. La fraîcheur d’une nouvelle culture est la bienvenue mais je n’oublie pas de conclure sur une petite liste de faits divers.


Fun facts sur le Pérou

  • Les coupures d’eau y sont fréquentes, parfois pendant plusieurs heures. Le thème de la gestion de l’eau devient nationalement de plus en plus préoccupant.
  • L’accumulation de sons de différentes sources en Colombie en fait une mélodie constante quand celle au Pérou s’apparente à du bruit. Pour cause principale, le réflexe de klaxonner pour absolument tout de la part des taxis et des voitures en général. J’en suis arrivé à lâcher un régulier « ta gueule » à chaque nouvelle pression du bouton, petit hommage au film « RRRrrr ».
  • Plusieurs fois, je m’agacerai du comportement en société de nombreux péruviens : tu fais la queue on te double sans honte, on se précipite pour prendre les places libres dans le bus sans avoir la courtoisie de la laisser au public plus sensible, on te bloque la route dans la rue parce qu’il se passe quelque chose d’incroyable sur le téléphone (j’ai fini par crier plusieurs fois des « bouge ! »), on écoute la musique ou des vidéos très fort… Bref une accumulation qui m’aura vraiment fait saturer à plusieurs reprises. Peut-être que la fatigue aura joué, qui sait ?
  • Enfin des librairies ! Cela fait tout drôle de revoir ce genre de magasins absolument inexistants en Colombie et en Équateur des lieux visités.
  • De nombreuses marques jaunes au sol (des cercles avec un S au milieu) pour signaler les zones de sécurité face au risque de séisme.
  • Les casinos sont monnaie courante mais j’avoue en avoir vu beaucoup au Pérou. Enfin, plus que des casinos ce sont des salles de jeux avec des machines à sous.
  • Impossible de parler du Pérou sans évoquer sa cuisine dont la créativité est la bienvenue après 6 mois de voyage. La fusion avec la culture japonaise et chinoise ont permis la réalisation de nombreux mets savoureux comme le ceviche.
  • Sujet délicat, le pisco dont l’origine est contestée entre le Pérou et le Chili. Ici tout le monde me dit qu’il est originaire du Pérou tandis que mes premiers pas au Chili me feront vite arrêter d’évoquer le sujet tant la passion est ardente sur la réponse, toujours bien trop argumentée. Moi je dis, c’est les espagnols qui ont apporté le raisin et qui en sont les inventeurs.
  • J’ai pris l’habitude de négocier ces derniers mois mais la froideur des péruviens et parfois l’agressivité ou la fermeté face aux étrangers désarment tant elle n’est pas habituelle sur les terres d’Amérique du Sud que j’ai parcouru.
  • Les gens sont en général plus réservés dans la rue. Si on m’aborde, ce n’est pas pour me souhaiter une bonne journée mais pour me demander quelque chose ou me proposer une quelconque activité touristique. En vivant l’expérience, je me rends compte de l’importance que j’attache à ce genre de comportements et je regrette mon temps en Colombie.
  • Une des premières choses que j’aurai remarqué en arrivant est qu’ici les colombes ont les yeux entourés de bleu
  • Je t’ai déjà parler des bus de nuit qui arrivent à 5h du matin ? Cette tradition m’aura vraiment fatigué tout le long de ma traversée. Non, vraiment, y a des choses qui méritent de disparaître dans ce monde et cette habitude est dans le top de ma liste.
  • Les femmes ne fument pas au Pérou et j’ai beau avoir cherché l’explication, je ne l’ai pas encore trouvé. Une idée ?

Cette liste de petites choses ayant marqué mon quotidien au Pérou ne prend en aucun cas le dessus sur toutes les aventures et les incroyables moments que j’ai vécu ici. J’ai fait de nombreuses rencontres de péruviens et péruviennes qui laisseront une remarquable flamme brûler en moi en repensant aux moments partagés avec ces personnes que j’espère revoir si le hasard de la vie le permet.

Comments

  1. Julia

    Bonjour, j’ai beaucoup aimé votre article qui me conforte encore plus dans mon choix de passer par llachon et de passer plus de temps près du Titicaca,je viens de Nouvelle Calédonie et donc pas fan du tourisme de masse mais bon! En vacances on joue tous le jeu!
    Enfin j’ai encore le temps d y penser.
    Bonne continuation à vous et merci pour votre partage. Julia de Nouméa

    1. Bonjour Julia et merci pour votre commentaire. J’ai quelques compagnons voyageurs qui ont trouvé des expériences plus immersives une fois à Llachon, je n’ai pas spécialement les “meilleures” adresses allant plus où mes pas me guident mais j’ai découvert que pas mal de voyageurs, souvent en couple, donnent de chouettes conseils sur Instagram notamment pour ça. N’hésitez pas si vous avez besoin que je fasse une recherche. Bonnes fêtes !

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