Jours 294 à 299 – mardi 11 à dimanche 16 juillet 2023 – Santa Ana, San Salvador – Salvador
Mes premières impressions du Salvador ne diffèrent pas tant de celles du Guatemala sur sa région sud, le long du Pacifique. Les volcans sont tout aussi présents et camouflés par un tapis de verdure. Vallonné sur toute sa surface, le pays offre un climat tropical et la fraîcheur est difficile à trouver. Comme chaque fois, le premier jour consiste à retrouver ses repères, s’équiper d’une carte SIM locale et de dollars américains.
Les productions de café sont légions sur l’ensemble du territoire et sont un héritage de la République caféière (1876-1931) tendant davantage vers l’oligarchie. Gouvernée par une élite économique d’origine européenne, les terres n’appartiennent plus aux paysans et deviennent de grandes exploitations. Les familles au pouvoir nommaient directement les présidents pour donner une idée de leur influence. Pourtant, durant cette période l’idée d’une nation se faisait de plus en plus sentir et un soulèvement se prépara, bien que désorganisé, après la crise de 1929 et l’effondrement du prix du café.
Après l’échec électoral de 1932, le Parti Communiste Salvadorien encourage un soulèvement des paysans contre les grandes propriétés terriennes. Si des fermes et des casernes sont attaquées et qu’on peut compter une cinquantaine de victimes, la répression sera sévère avec l’exécution en majorité des « suspects » indiens et de leurs familles. Avec le soutien des américains et des anglais, ce seront entre 10 000 et 40 000 victimes « bolcheviques » qui tomberont. Le pays sombrera sous le joug d’un autoritarisme fascisant malgré le rappel à l’ordre des États-Unis avant de laisser place à une guerre civile que j’évoque dans le prochain article.
J’en finis avec mon aparté historique. Ma première étape se déroule à Santa Ana où la chaleur me terrasse grandement et joue sur ma motivation. Je sens avoir franchi le fameux cap du voyage de longue durée où il est plus facile de résister à la tentation permanente de faire une nouvelle activité.

L’absence de succès de Couchsurfing dans cette région du monde me limite dans la rencontre d’habitants du coin. Je préfère limiter les rencontres dans les auberges même si je me laisse approcher et suis toujours heureux de partager des informations. Une autre option reste les applications de rencontres pour prendre un café et avoir les meilleures recommandations pour découvrir des lieux plus authentiques. Il faut rester clair sur ses attentes et avoir une disponibilité commune dans un contexte de mouvement permanent, ce qui n’est pas simple non plus.






Le coût de la nourriture est encore plus accessible au Salvador et je découvre en me baladant dans les marchés et les comedors plusieurs spécialités culinaires. Après les galettes de blé ou de maïs (tortillas) accompagnant chaque repas à la manière du pain en France depuis le Mexique, je découvre les pupusas, ces galettes à base de farine de maïs blanche se conjuguent avec une quantité d’ingrédients illimitée. Souvent avec une base de fromage râpé, les plus classiques sont fourrées de pâte de haricots rouges, de différentes viandes, de fleur de courgette, etc.


On apprend souvent au son avant l’odeur que des pupusas sont préparés pas loin en écoutant les femmes en devanture des échoppes en train de frapper les galettes en préparation entre leurs mains. Très clairement, ce son peut être tendancieux et fait souvent sourire les visiteurs qui ne sont pas habitués. En tout cas, elles sont économiques et accompagnées d’une salade de choux et de carottes en libre service. Des légumes sont sacrément les bienvenues à manger plusieurs mois dehors.

La tentation de cuisiner est assez forte mais l’état des cuisines partagées ou le coût d’achat des ingrédients de base pour faire un repas simple sont de bons freins. Au final moins économique pour un voyageur solitaire, c’est aussi pour des raisons pratiques que je ne le fais pas : la fragilité des aliments face à la chaleur ou au transport ou encore le danger d’une huile d’olive pour ses affaires sans parler du poids additionnel aux 20 kg déjà assumés.
Mon séjour n’est pas que gastronomique et je me lance dans l’ascension du volcan Ilamatepec dominant le lac et la péninsule qu’il a façonné à travers ses éruptions. De ses 2381 mètres d’altitude, il est le plus haut volcan du pays. Il offre à la vue des curieux qui l’escaladent son cratère sommital dont les roches et l’étendue d’eau bouillante sont composées d’un grand panel de couleurs qui varie en fonction de l’intensité de la lumière.

Malheureusement, je découvre en arrivant que le Salvador oblige par la loi d’être accompagné dans les parcs nationaux même pour les sentiers les plus simples. Me voilà à payer un guide qui m’explique que nous allons attendre que toutes les personnes venues en transport en commun se réunissent.
Je lutte avec moi-même pour ne pas faire demi-tour et après quelques négociations, je le préviens que je partirai à mon rythme à partir du moment où nous rentrons dans le parc. Hors de question de suivre un groupe de 42 personnes qui passe plus de temps à faire des photos et des pauses qu’à marcher. Je sais par expérience qu’observer des animaux avec un groupe de personnes est mission impossible.

Le guide est payé. Je me suis renseigné sur les espèces dangereuses présentes dans le parc et le sentier à suivre. Vu le nombre de groupes que j’ai vu partir avant nous, je me doute que ce sera probablement une autoroute. L’ascension était supposé prendre 2h, j’en prend moins de la moitié pour profiter de la vue et d’un moment de calme au sommet avant l’arrivée des groupes (et de la potentielle pluie régulièrement violente durant mon passage).
Comme souvent dans les pays latins, les locaux n’ont pas pour la plupart l’habitude de marcher (l’insécurité des villes pousse à prendre systématiquement la voiture et cette culture de la marche n’est pas développée). Ceux que j’observe s’aventurer sur ce chemin sont accompagnés de guides ou de gardes du corps armés, ce qui s’entend au Guatemala avec les braquages sur les chemins de randonnées mais moins au Salvador.




C’est souvent en descendant que je prends le plus de temps pour errer et observer. J’ai ainsi l’occasion de croiser quelques toucans de près et autres oiseaux tropicaux. Ouf !



Après une situation désagréable avec une personne de l’équipe de l’hôtel et malgré ma patience et ma tentative de communiquer, je décide de quitter les lieux le jour-même. Pourquoi resterais-je là où j’observe clairement un manque de respect ? J’improvise donc mon départ pour la capitale sans trop savoir où me diriger. Comme souvent, les locaux me guident avec un grand sourire et me voilà reconnaissant, embarqué dans le premier bus qui passe.
La capitale est un sacré contraste avec ses grandes tours et ses nombreuses 4 voies remplies. En me faisant une toile dans un centre commercial, je fais la rencontre de Maria avec qui je partagerai un chouette dîner et même une soirée à aller danser et faire un karaoké (le premier d’Amérique centrale : c’est un scandale que j’ai attendu autant). Le centre-ville n’offre rien de bien fascinant et même les quelques musées où je cherche à découvrir l’histoire de cette région et de cette nation sont peu enrichissants.











Ayant donc assez vite fait le tour, je pars me perdre dans le village de Suchitoto dont le lac artificiel de 135 km² alimente la majorité du pays en électricité après avoir submergé plus d’une vingtaine de sites archéologiques lors de sa création.