Un mal de cul qui en vaut la peine

Jours 45 à 49 – Colombie – Jardín, Jerico, Guatape, Medellín

Sacré titre hein ? Je voulais commencer l’article en te remerciant de prendre le temps de me lire et de suivre mes aventures, encore loin de celles de Bilbo ou Frodo. À chaque réveil, j’apprécie de savoir que quelqu’un est passé par ici et en a profiter pour me le dire à travers un commentaire. Clairement, ça me donne le sourire, alors un grand merci ! Pense néanmoins à signer car ce n’est pas toujours simple de deviner avec les mails ou les pseudos.

Ma tête quand je lis tes commentaires !

Je profite de la proximité avec Medellín de plusieurs villages réputés tout en me déplaçant avec mon petit sac de 30l que j’ai avec moi au quotidien (on est mieux sur le dos avec un sac de 6 kg que deux sacs d’un total de 16 kg). Suivant les conseils d’Elisa et de Tefi, je finis par m’improviser un itinéraire chargé. Nous sommes le 8 juin et je pars (beaucoup trop tard) en taxi en direction de l’un des deux terminaux de la ville. Bingo, un bus part bientôt pour Jardín !

Après quelques bouchons ne m’empêchant pas de progresser fièrement dans ma lecture de « The Terror » de Dan Simmons sur la liseuse de mon frère, la route se présente de plus en plus capricieuse. Je suis finalement forcé de fixer la route, parfois en travaux, souvent en zigzag selon les voies praticables sans amas de roches suite à un effondrement ou sans trou sur le flanc de falaise. Les nids de poule et la terre rendent impossibles toute tentative de piquer une sieste. L’espace pour les jambes étant limité, trouver une position confortable est un luxe.

Je le sais désormais, pour connaître la durée d’un trajet, il faut prendre en compte l’optimisme des colombiens et rajouter entre un tiers et la moitié du temps indiqué. Heureusement, sur ces 6h de voyage, les paysages changent régulièrement et continuent de me surprendre. La magie de la Cordillère. On pourrait d’ailleurs parler des « Cordillères » des Andes en Colombie puisqu’il y a l’occidentale, la centrale et l’orientale.

Avec un dos et des fesses en compote, je découvre Jardín et je comprends pourquoi cet endroit est apprécié. Fidèle aux villages de la région que je m’en vais découvrir, il offre des séries de murs colorés, parfois des balcons végétalisés, la vue sur des plantations de café, de cannes à sucre et de bananes. L’ambiance sonore est toujours fidèle à la Colombie mais avec moins de trafic. La grande place est pleine de terrasses que les paisas et quelques touristes remplissent avec plaisir.

Bientôt 16h, je me dirige vers un parc caché réputé pour l’observatoire d’oiseaux qu’il offre. Après m’être prêté au jeu quelques temps, je profite de la nuit tombante pour une courte randonnée m’offrant un point de vue sur le village et les montagnes à proximité. J’adore cette impression d’avoir découvert un endroit plein de vie au milieu de la nature. Cela me donne une sensation de respect et d’harmonie avec la nature. Bien sûr, il suffit de faire quelques pas pour savoir que nous sommes loin de ça rien qu’en trouvant toujours plus de déchets au sol et dans les cours d’eau. De ce que j’ai pu en comprendre, la faute à un manque d’éducation et d’une politique de gestion des déchets. C’est d’ailleurs dans les villes qu’on peut voir, à l’image d’Istanbul, les personnes les plus démunies rechercher ce qui est recyclable (verre, carton, plastique), à même le sac poubelle plein.

De retour du mirador, après quelques recherches pour mon prochain déplacement, je trouve une auberge de jeunesse où passer la nuit. Je profite de l’ambiance de la ville sur la place centrale pour dîner accompagné de ma liseuse avant de me montrer raisonnable (pour une fois) et dormir tôt. A 4h, je me retrouve dans un bus et c’est reparti pour plusieurs heures de bus dans les mêmes conditions que la veille. Un changement se fait dans un hameau sans que je sache quand daignera se montrer le bus. Presque deux heures plus tard, la chance me sourit et me voilà reparti pour m’enfoncer dans la montagne mais cette fois en direction de Jerico. Quelle frustration quand on regarde une carte et qu’on se voit juste à côté à quelques kilomètres mais que le trajet dure des heures.

Dans ce nouveau village similaire au précédent, je devine au regard des passants que les touristes ne s’aventurent pas beaucoup jusqu’ici (ça rajoute au côté épique du voyage). Après avoir cherché un free walking tour qui ne se fait plus (conséquences du COVID, oui je dis le COVID tu vas t’y faire), je me permets un petit-déj copieux et je recherche des activités. Je visite un musée assez humble racontant l’histoire de la région, du village et de ses habitants. J’enchaîne avec une dégustation de café de 2h qui m’est proposée (et dédiée) par Juan Carlos au Saturia.

Une fois le fruit rouge cueilli à la main -car chaque fruit murit à son propre rythme-, la graine est récupérée. La mécanisation est d’autant plus impossible pour la récolte vu le nivellement des exploitations. Après un mois de séchage dans un sac plastique sans air ni lumière, on met le grain dans un sac spécial en maïs durant deux ans (añejamiento) et on retire les deux peaux en deux fois. Lors de la torréfaction, on récupère la vapeur du processus sous forme liquide pour en faire un engrais naturel riche en nitrogène, à vaporiser sur les caféiers.

Le grain séché (à droite) est toasté trois minutes et séparé entre le bon (à gauche) et le mauvais (au centre). Ce dernier est utilisé par… Nescafé (et d’ailleurs on peut entendre la contradiction de “No es café” ou ce n’est pas du café, petite blague colombienne).
Au premier plan, on peut voir de droite à gauche le grain toasté par tranche de 3 minutes. Les trois bols représentent de droite à gauche le café doux, médium et fort.

Place à la dégustation. En Colombie, le café est uniquement de l’arabica mais connait différentes sous-variétés. Il est 11h quand je vois la série de shots devant moi et je commence à m’inquiéter. Aucun alcool à l’horizon, ouf. L’un contient de l’eau sucrée, un autre de l’eau salée et le troisième un eau acide avec du jus de citron. Les pépins de citron sont amers quand on les croque. Aussi, nous testons la dégustation du café doux puis médium et enfin fort avec derrière la recherche des arômes dégagés par chacun. L’exercice prend du temps et j’apprends à mon palais à reconnaître les différentes associations en goûtant un shoot différent avant chaque gorgée. Très chouette exercice qui me rappelle la dégustation de vin. Au passage, nous profitons de tester trois manières de préparer le café : chemex, dripper et à l’italienne.

Je me rends compte que le temps est passé vite. Je dois me presser pour parcourir le jardin botanique et prendre le bus jusqu’à Medellín, y passer la nuit et repartir le lendemain pour Guatape. Ce rythme ne m’enchante pas mais j’espère pouvoir me reposer les jours suivants. A l’entrée du parc, un groupe de jeunes m’interpelle et ne me met pas à l’aise. Je ne les crois pas dangereux mais les groupes rendent les individus stupides. J’accélère donc le pas pour les semer et grimpe jusqu’au Christ qui domine la ville. Trop tard pour redescendre et prendre le bus. En marchant, pensant aux options à envisager, je reconnais la route et je réalise que mon transport devrait passer par là. « Medellín ? Si, amigo » ! Et voilà, un vrai colombien désormais qui prend le bus à même la route !

Malgré la difficulté à trouver la motivation et après quelques péripéties, me voilà le lendemain en route pour Guatape. Le lieu est relativement impressionnant après l’inondation volontaire de la vallée. Une série de lacs artificiels entourés de montagnes donne la sensation d’être perdu au milieu d’un archipel. Prisé, la beauté du paysage est polluée par les propriétés de luxe et les loisirs aquatiques sportifs et bruyants.

Après une tentative de randonnée interrompue par un portail de propriété privée qui n’apparaissait pas sur ma carte, je décide de ne pas passer la nuit sur place. Après un café dans un centre-ville animé et coloré, je me rends au célèbre monolithe El Piñol de 70 millions d’années. Haut de 220 mètres (pas loin du double si on compte la partie sous terre) et équipé d’un escalier de plus de 700 marches sur une énorme fissure (selon la légende, la marque du Diable lorsqu’il a échoué à bouger la bête), il offre une vue unique sur les environs. Après un moment de contemplation, je presse à nouveau le pas pour rentrer chez Tefi.

J’ai même pas pleuré pour arriver en haut.

Dans le bus (pour changer), malgré les bouchons interminables, je rêve d’une petite bière et de mon lit. Je retrouve de manière inattendue Alexia et David rencontrés dans le désert de la Guajira pour réaliser la première partie de mon rêve (tu te calmes, ils ne m’accompagneront pas à la réalisation de la seconde partie). Dans un bar à l’ambiance rock, nous partageons quelques bières fort gouttues (chose rare) après quelques dégustations proposées par le serveur et nos aventures depuis notre séparation.

Les jours suivants, je récupère et profite de pouvoir prendre ce temps libre sans avoir la sensation de me sentir de trop chez Tefi. Sentant un début de grippe monter (peu étonnant vu l’épidémie dans le pays), je me force à bouger ne voulant pas tomber malade « chez quelqu’un ». Direction un des plus beaux villages de Colombie : Salamina.

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